Medscape – En raison du mode de vie actuel, le temps de sommeil dans la population générale s’est considérablement dégradé et constitue désormais un réel problème de santé publique. On peut dès lors se demander quels sont les effets du sommeil – et des troubles associés – sur le diabète. Le Pr Véronique Kerlan (CHU de Rennes) a fait le point sur la question lors du congrès virtuel de la Société Francophone du Diabète (SFD )[1] .
L’association entre les troubles du sommeil et le risque de développer un diabète de type 2 (DT2) a été largement démontrée dans la littérature. Une méta-analyse de 36 études épidémiologiques, portant sur plus d’un million de personnes, a révélé qu’une durée de sommeil inférieure à 5h était associée à un risque accru de 50% de développer un diabète ; si la durée est supérieure à 9h, le risque augmente de 36% (BEH). Des études prospectives sont arrivées aux mêmes conclusions : une méta-analyse a montré un risque minimal de développer un diabète pour un temps de sommeil aux alentours de 7,7h.
S’il est clair que le temps de sommeil joue un rôle dans le risque de développer un diabète, indépendamment de cela, la qualité du sommeil (les difficultés à rester endormi et les difficultés à s’endormir) constitue un facteur de risque tout aussi important. Au cours de la Nurses’ Health Study, 133.563 infirmières ont été suivies. Parmi celles-ci, 6.407 ont développé un diabète. Leur risque relatif (RR) de développer un diabète en cas de troubles du sommeil vs sans trouble du sommeil était de 1,45 vs 1,22 après ajustement sur l’HTA, la dépression et l’IMC. Les infirmières ayant un travail posté, avec des horaires variables, avaient une augmentation du risque de près de 30% de développer un diabète, après ajustement sur divers facteurs. En comparaison, en cas de travail posté et de trouble du sommeil, le risque était multiplié par 2.
Le cas du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS)
La prévalence du SAOS chez les personnes souffrant de DT2 est de 52 à 75% (contre +/-20% dans la population générale), avec un IAH (Indice d’Apnée Hypopnée) > 15 événements/h chez 18 à 53% des patients.
Selon les données du registre European Sleep Apnea Cohort, portant sur 6.616 participants, plus la sévérité du SAOS était importante, plus l’HbA1c était élevée. La prévalence du DT2 était de 6% en cas de « non SAOS », de 14% en cas de SAOS léger, de 21% en cas de SAOS modéré et de 28% pour la forme sévère. Une méta-analyse de 8 études (n=63.647) a montré que le risque de développer un diabète chez les patients souffrant de SAOS était multiplié par 2, et de 49% après ajustement sur l’âge, le sexe et l’IMC.
Une publication récente (Diabetes Care, août 2020), portant sur 3.667 patients DT2 souffrant de SAOS vs 10.450 patients DT2 sans SAOS, a montré qu’il y avait plus de risque de développer des complications (problèmes CV, insuffisance coronaire, insuffisance cardiaque, neuropathies, insuffisance rénale) chez les patients atteints à la fois de DT2 et de SAOS.
Les troubles du sommeil favorisent le syndrome métabolique et le développement du diabète. Ils doivent donc être évalués comme les facteurs de risque classiques de diabète, au même titre que l’IMC et les antécédents familiaux de diabète. La recherche de troubles du sommeil, y compris la recherche d’un SAOS doit être systématique chez les patients diabétiques.
« C’est par le dépistage et le traitement d’éventuelles pathologies du sommeil qu’il sera possible d’éviter l’aggravation des troubles, et l’apparition du diabète », a commenté le Pr Kerlan.
Cet article a été initialement publié sur MediQuality.net du réseau Medscape.
Actualités Medscape © 2020 WebMD, LLC – 17 sept 2020.